Goutte à goutte
Texte original écrit par Vinnie Dime
Il avait dû être beau dans sa chemise avant la révolution.
Aujourd’hui, elle est déchirée, salle, imbibée du sang de ses mains dont les ongles ont été arrachés. La salive dégoulinant de sa mâchoire brisée dilue le mélange de liquide rouge et poisseux et de crasse.
Il ne sais pas qui est cet Aliou Ben Salah. Et il le paye le prix cher depuis des semaines. Des mois ? C’est dans cette cellule exigüe et poussiéreuse qu’il va finir ses jours. Quelque part, de l’eau tombe sur le sol. Goutte par goutte. Le son sec se réverbère contre les murs de béton nus. A l’infini. Jusqu’à l’impact suivant.
Plic !
Pourquoi se retrouve-t-il ici ?
Ploc !
Il devrait être en train de jouer avec ses enfants, auprès de sa femme !
Plic !
Les GIs avaient surgi de nulle part.
Ploc !
Avant qu’il n’ai pu comprendre ce qu’il lui arrivait, il s’était retrouvé dans le Humvee.
Plic !
Puis, après une attente interminable, le départ pour l’Amérique.
Ploc !
Là-bas, il y avait des tribunaux qui rendaient leurs jugements de manière impartiale.
Plic !
Pensait-il.
Ploc !
Mais il ne fût pas traduit en justice.
Plic !
Comment se sortir de là ?
Ploc !
Un avocat allait sûrement venir !
Plic !
Il lui expliquerait tout !
Ploc !
Et l’homme plaiderait en sa faveur.
Plic !
Il serait relâché !
Ce n’était qu’une question de temps !
Ploc !
Plus que ses mains et sa mâchoire, sa tête le faisait souffrir. Le sang battait à ses temps. Depuis combien de temps n’avait-il pas dormi ? La régularité du goutte à goutte était aussi redoutable que la netteté de la collision entre l’eau et le sol.
Il trouverait un moyen !
Plic !
Il reverrait sa femme !
Ploc !
La douce Falima.
Plic !
Ou était-ce Belawa ?
Ploc !
Il ne se rappelait-plus son visage !
Plic !
Ces explosions humides lui volaient ses souvenirs !
Ploc !
Le martyr qu’il endurait était au-delà de ses forces !
Plic !
Il FALLAIT que cela cesse !
Ploc !
Sans même réaliser ce qu’il était en train de faire, il se mit dos au mur.
Plic !
Il sentait le froid de la paroi brute mordre son corps meurtri.
Ploc !
De toutes ses forces, il projeta sa tête contre le mur opposé et fût heureux de ne plus entendre l’eau tomber.
Plic !
Puis son cerveau cessa de fonctionner.
Ploc !
Mug's Tale 
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